Journal d’un tribunal

Pendant trois semaines, Imagine a arpenté les couloirs de la justice liegeoise et les trois divisions (Liège, Verviers et Huy) du Tribunal de première instance. Un reportage au long cours pour observer et raconter les mille et un visages de la justice pénale et civile, ses splendeurs et ses misères. Une justice tour à tour pédagogique et humaine, hermétique et expéditive, ordinaire et fastueuse, aux côtés de juges, d’avocats, de greffiers, de justiciables… Voici notre Journal d’un tribunal au plus près de la vie judiciaire, là où bat le cœur de notre Etat de droit.


Cet article a été publié dans notre n°130, à l’hiver 2018.

Première semaine

Lundi,  allô police ?

– « Le 7019 ? »

– « Etat d’ivresse. 2,41 grammes, pas mal ! », ironise le juge Dumont. Le petit homme à lunettes baisse la tête, tout penaud. Son avocat prend les devants : « Monsieur conteste tout, il était passager. C’est son frère qui conduisait. » Le magistrat épluche le dossier, perplexe : « Six condamnations à son actif : délit de fuite, excès de vitesse, ivresse… ». Mais il écoute les arguments : les deux frères hors du véhicule à l’arrivée de la police, l’attestation de la conductrice d’en face.

« Je vous demande l’indulgence, M. le juge. J’ai six enfants à charge. Si je perds mon permis, c’est la catastrophe. » L’affaire est reportée : des devoirs supplémentaires seront effectués pour déterminer qui des deux frères était effectivement au volant.

– « Le 7022 ? », enchaîne le huissier.La salle A du tribunal de police est bondée, les contrevenants se succèdent : des mines sombres, apeurées, aux aguets. Jeunes, vieux, tous milieux sociaux confondus. Avec ou sans avocat. Tous auteurs d’infractions plus ou moins graves au Code de la route.

Les sanctions tombent, tel un couperet. Le conducteur pressé qui a pris la fuite après un accrochage : une peine de quatre-vingts heures de travail, huit jours de déchéance de permis.

Le transporteur qui a bidouillé son tachygraphe en se mettant en pause alors qu’il travaillait : 600 euros d’amende. Le chauffard à 173 km/h sur l’autoroute, sans antécédents, mais qui ne « s’était pas rendu compte » : 240 euros à payer.

Ici, c’est une justice exécutive, prompte en besogne, parfois moralisatrice : le juge pose le cadre, la défense va droit au but, le ministère public ne s’étend guère. Avec ses inattendus techniques – un vice de procédure, une erreur de plume, le verbalisant pas suffisamment formé, un éthylomètre non conforme… –, mais aussi sa part d’humanité.

Photo: JeanLouis Wertz

« J’ai eu deux pontages, raconte un homme tremblotant, appuyé sur sa canne. Je ne buvais plus. Mais au décès de mon frère, après le départ de ma femme, j’ai craqué ». Contrôlé à 2,5 gramme, sur un parking, il raconte en deux mots sa situation. « Je suis au CPAS, je mange grâce aux colis alimentaires, je fais du bénévolat, j’essaye de m’en sortir M. le juge. »

Le magistrat a l’oreille attentive : ni amende, ni retrait de permis, mais une formation à l’IBSR. « Merci… », l’homme s’en retourne, soulagé.

Une conductrice qui souffre de troubles bipolaires contrôlée positivement, un entrepreneur récidiviste pris à 136 km/h au lieu de 50, un jeune commercial de chez Ethias réveillé sur la bretelle d’autoroute après une soirée arrosée… Les dossiers s’enchaînent et les peines tombent.

Une jeune mère de deux enfants qui « travaille dix-neuf heures semaine, avec des horaires de nuit », citée pour avoir emprunté un sens interdit, s’avance à la barre, la voix chevrotante : « Je n’ai pas vu le panneau… » Plutôt qu’une amende lourde (« impossible à payer, Monsieur »), le juge est compréhensif et opte pour une formation. L’audience du matin touche à sa fin. Dans le couloir, on lit : « Respecte le code de la route, évite un carton rouge ! » A côté d’une autre affiche pour une « soirée du rire » avec les Fratelli Brothers. Amusante justice quand tu nous tiens…

Mardi, une sortie de prison

« Le juge de Maere est un menteur, un tricheur ! » Posté à l’entrée du Palais, un justiciable obsessionnel et habitué des lieux s’attaque à sa dernière cible. Une personne handicapée en voiturette électrique se bat avec les portes. Les gardiens de G4S enchaînent les contrôles de sécurité. Le comptoir d’accueil, lui, ne désemplit pas : des justiciables un peu perdus, avec ou sans convocation, énervés ou en retard, qui ne savent pas où aller, face à ce gigantesque labyrinthe : « C’est pour une médiation de dette », « je cherche un avocat pro deo », « je sors de prison et je suis en sursis », « je viens pour la garde exclusive de ma fille »… 

« On voit de tout, racontent les employées de service. Des gens paniqués, impolis, agressifs, mais aussi reconnaissants. Certaines personnes ne savent pas lire, ne comprennent pas où elles sont. On essaye de les aider, de garder le sourire. Le mardi, le jour des audiences ‘‘famille’’, il n’est pas rare qu’une bagarre éclate. Mais depuis l’arrivée des gardiens et du portique sécurisé en février, la pression est retombée d’un cran. Il y a moins de va-et-vient, de toxicomanes ou de sans-abris qui rentrent. »

La fouille systématique laisse songeur : « On retrouve de tout, glisse un agent privé, des bombes flashs, des couteaux, une scie pliable, un taser, des stupéfiants… Cela veut dire qu’avant nous, tout ça rentrait. Pour faire quoi ? Allez savoir ! »

Mercredi, des armes et des voix

Ce matin, devant la 17e chambre correctionnelle, tout commence par des dossiers d’armes. Un flic sans casier qui a trempé dans un vulgaire trafic de fusils de chasse. Un fan de militaria qui a revendu trois matraques à la brocante de Saint-Pholien : « J’ai acheté le lot sans savoir, Madame, j’ai été distrait. C’était pour arrondir les fins de mois », raconte sans vergogne ce papy de 81 ans déjà condamné à trois reprises pour des faits similaires. Un jeune ouvrier, qui a écoulé via Facebook un taser gun, une matraque télescopique et des sprays au poivre. « Je ne suis pas un délinquant, j’ai juste des soucis d’argent », se défend ce père d’une fillette de 4 ans, « prêt à travailler gratuitement » pour sa peine.

Photo JeanLouis Wertz

L’audience se corse avec un ressortissant irakien poursuivi pour menaces et outrages à répétition sur des policiers. A plusieurs reprises, il a agressé verbalement le même inspecteur de police en plein centre-ville. L’expertise mentale évoque une personne « immature et vulnérable ». L’avocat plaide sa cause : aucun antécédent, aucun coup porté à la victime.  « J’ai entendu des voix, je n’arrivais pas à me contrôler… », soutient dans un français fragile ce petit monsieur propre sur lui.  Le procureur requiert deux ans d’emprisonnement avec un traitement médical adapté en guise de sursis probatoire. « Tenez-vous à carreau ! », préconise la présidente.

Vol avec violence, fraude informatique, détention, torture… Pour l’accusé suivant, c’est du lourd. Deux dossiers conjoints, et une comparution sous escorte. Le 7 juillet 2016, sa copine est partie avec un autre : il bastonne l’amant, lui vole sa tablette. « J’ai mal agi », concède le bonhomme, la boule à zéro, le visage blême. « Mais elle était enceinte de moi… »

Un an plus tard, à Aywaille, il remet le couvert en s’attaquant cette fois à une connaissance de sa nouvelle compagne, à qui il a tenté d’escroquer 1 000 euros. « Encore une affaire de femme, si je comprends bien ? », lui demande la juge Sadzot avec tact, respect, mais fermeté : « Il lui avait proposé une fellation, et même plus. J’avais envie de le punir… »

S’en suivra une véritable nuit de l’horreur :
« Ils étaient quatre types, je suis tombé dans un guet-apens, raconte la victime encore sous le choc. Il était sous cocaïne, il m’a éclaté la figure avec un coup de poing américain et menacé avec un couteau. J’ai du faire le cochon puis le chien. Ils rigolaient, m’appelaient François Pignon. J’ai dû boire mon urine dans une canette. J’étais en sang, flippé, humilié. Depuis, je ne vis plus… Je voudrais tant en finir… »  

Jeudi, des loyers impayés

« Entrée interdite aux chiens et aux vélos » prévient l’écriteau devant l’annexe nord : voilà les maîtres et les cyclistes prévenus. Quatre mâts flottent au vent – mais où sont donc passés les drapeaux officiels ?

A deux couloirs de là, dans la salle F.O.D, la justice de paix bat son plein. Crédits à la consommation, recouvrement de créances, loyers impayés, baux commerciaux… « Quarante dossiers au rôle, c’est calme ce matin », prévient Charles, le huissier.

Photo : Jean Louis Wertz

Un propriétaire voudrait récupérer 15 368 euros d’arriérés de loyer.

Un enseignant à la retraite obtient un étalement de sa dette (50 euros pendant 6 mois). Une dame haute en couleur s’emmêle dans ses papiers et s’exclame, avec un accent liégeois à couper au couteau : « Je n’ai jamais volé un franc à mes locataires, M. le juge ! »

Le président Ghuysen écoute, tempère et dialogue avec les avocats. L’esprit est à l’apaisement, à la conciliation.

Deux familles s’affrontent autour d’un appartement : « Vous êtes un escroc Monsieur ! ». Son conseil le calme.

Un couple de retraités et leur locataire s’avancent. Il y a de l’électricité dans l’air : il n’a pas entretenu la chaudière et « oublié de souscrire une assurance », le conflit s’éternise depuis des mois,ils voudraient qu’il s’en aille. Le juge fait la part belle à chacun, puis tranche : « résiliation du bail au 31 août, délai d’expulsion de huit jours ». Les parties s’en vont, visiblement soulagées…

Vendredi, à Verviers-la-débrouille

Soudain, un bruit assourdissant vient perturber l’audience : « C’est le Palais qui s’écroule ! », plaisante le président. Avant de se reprendre, plus sérieux : « Au train où on va, ça arrivera bien un jour. Espérons que ça soit la nuit… ». L’affaire reprend son cours : le soir de Noël 2015, à Verviers, deux frères solidement éméchés s’en sont pris aux forces de l’ordre appelées en urgence par une voisine. Ils sont poursuivis pour outrages, menaces et coups. Trois policiers ont été blessés, l’un d’eux a subi soixante-six jours d’incapacité de travail. Une « rébellion apocalyptique », dénoncera le juge.

Sous les arcades du Palais de Justice de Verviers, ce n’est pas encore l’apocalypse, mais ça sent tout de même la fin d’un certain monde : l’édifice construit au début du 19e siècle et propriété de la Régie des bâtiments connaît depuis de longues années de sérieux problèmes de stabilité, il a été partiellement fermé et doit être stabilisé et sécurisé.

La nouvelle aile inaugurée en avril 1995 ne se porte guère mieux : récemment, la cour intérieure était sous eaux à cause de graves défauts  d’étanchéité… « Une malfaçon parmi tant d’autres, dénonce un employé. Ce Palais, c’est une plaie ouverte. »

Quatre salles interdites d’accès, des plafonds qui menacent de s’écrouler, un déménagement en Crapaurue dans d’anciens locaux des finances totalement inadaptés, un nouveau site qui se fait attendre… : « On bricole, on s’adapte et on pare au plus pressé », se désole la présidente de la division, Béatrice Absolonne.

Trop petites, pas assez sécurisées, les salles destinées à accueillir notamment les dossiers correctionnels et la chambre du conseil (qui intervient entre l’instruction et un éventuel procès) laissent franchement à désirer : « On entre et on sort comme on veut. Il n’y a pas de portique de sécurité. Quand plusieurs détenus sont impliqués, on se marche sur les pieds », s’inquiète un avocat. Au cœur de la ville où, deux rues plus loin, en janvier 2015, les services de sécurité ont démantelé une cellule djihadiste prête à commettre un attentat… « C’est un exercice permanent de haute voltige, en effet », acquiesce la présidente.

Entre l’ancien et le nouveau Palais, les justiciables ne savent pas trop où donner de la tête. Sous les ors de l’immense hall d’entrée froid et désert, on devine un comptoir d’accueil… vide. Etrange et écrasante justice qui, au détour d’un couloir, se retrouve condamnée devant des barrières métalliques et des écriteaux « hors service »

Désormais division du TPI de Liège, le tribunal de Verviers, ses dix magistrats, ses greffiers et ses agents du SPF Justice, doivent composer avec une réalité sociale complexe. « Le contentieux familial et la précarité explosent. Nous avons de multiples dossiers de stupéfiants. La justice de paix, le commerce, la jeunesse, tout le monde est débordé. Notre cadre est incomplet comme ailleurs, et on accumule les heures supplémentaires et les retards, déplore Béatrice Absolonne. Mais malgré tout ça, il y a une grande conscience professionnelle, un vrai sens du service public. Car derrière tout ça, il y a des gens qui attendent une décision, des vies à respecter. »

Deuxième semaine

Lundi, des bikers et une chaudière

Rue du Palais, une classe de lycéens bûche sur « la mort du commissaire Maigret », un quizz urbain grandeur nature, sans se préoccuper de la file des justiciables qui s’allonge à l’entrée. En cause : le procès dit « des motards » qui se déroule depuis plusieurs jours devant la chambre criminelle. Septante policiers déployés, un dispositif de sécurité renforcé, et toute la vie du tribunal est désormais chamboulée. Avec des audiences retardées, des détenus non acheminés, des avocats qui se désistent… Et beaucoup de grincement de dents. « Le barnum d’un côté, la justice ordinaire obligée de suivre derrière ! », dénonce un magistrat.

Il n’empêche : du sas d’entrée aux bancs des accusés, ça ne rigole pas. Dix bikers sont poursuivis pour assassinat. Et entre la bande des Hells Angels et celle des Black Pistons, la tension est maximale. Un procès sous haute tension, entre gros bras et regards sombres.

A l’étage d’en dessous, devant la 3e chambre civile, on débat d’un vice caché dans la vente d’une maison, du remplacement d’une chaudière au gaz à 3 477 euros, d’infractions urbanistiques… Une bataille d’experts et d’avocats mâtinée de débats forcément techniques.

Dans une salle voisine, à la 14e chambre, l’heure est aux appels de Police : le conseil d’une partie civile se fait furieusement attendre, un silence pesant s’installe, lorsque soudain les murs se mettent à trembler.  La routine : c’est juste un train qui entre en gare (Saint-Lambert) située en surplomb du Palais…

A l’étage de l’instruction, celui des crimes et délits, huit juges de droit commun et deux spécialistes des affaires financières sont également à pied d’œuvre. 24 heures sur 24, 365 jours par an, la garde est assurée.

Perquisitions, saisies, désignations d’experts, interrogatoires, écoutes téléphoniques : ces dix juges multiplient les devoirs d’enquête, rassemblent les preuves nécessaires, finalisent différentes affaires. Indépendants et impartiaux. « A charge et à décharge », comme le précise l’article 56 du Code criminel.

Photo : Jean-Louis Wertz

Trafics en tous genres, stupéfiants, mœurs, violences conjugales, homicides… Des affaires qui se succèdent, pour la juge Micheline Rusinowski : 149 dossiers rien qu’en 2018, 109 mandats d’arrêt délivrés, 44 décisions et extraditions… « Et des dossiers qui deviennent de plus en plus lourds, complexes et techniques, avec des ramifications vers l’étranger : les Pays-Bas, l’Italie, l’Allemagne… et des délinquants de plus en plus préparés et équipés notamment au niveau téléphonie et informatique », raconte la juge.

Moins de pouvoir, moins de moyens pour enquêter, des décisions à prendre dans des délais brefs, un équilibre à trouver entre l’usage des méthodes particulières de recherche et le respect de la vie privée, la cohabitation avec les parquets et les services de police : voilà leur lot quotidien. « Le métier s’est durci, constate la magistrate dotée de vingt-cinq ans d’expérience. Tant de misère sociale, de jeunes désinsérés, de brutalité, de banalisation de la violence, d’illégaux en errance… C’est le rêve de l’argent facile, des familles éclatées et démissionnaires, des gens qui vivent à la rue, dans des taudis innommables. On en voit tellement, on n’imagine pas. »

Mardi, à l’étage des présidents       

Le mardi, au 5e,  à l’étage des présidents, il y a comité de direction. Car depuis la réforme du paysage judiciaire en 2014, Liège n’a pas échappé au grand chambardement institutionnel : douze arrondissements judiciaires au lieu de vingt-sept, moins de tribunaux, des magistrats spécialisés et mobiles…

Désormais, le tribunal de première instance regroupe trois divisions (Liège, Huy et Verviers), avec un territoire étendu (un million d’habitants), une gestion centralisée et transversale et trois implantations « avec des cultures judiciaires et des habitudes de travail forcément différentes », précise Philippe Glaude, président du TPI. Lequel doit composer avec une justice sous-financée, un cadre du personnel incomplet, des changements de lois à répétition, un ministre de tutelle, ancien avocat d’affaires, qui « réforme la justice au lance-pierres »  et une « charge de travail qui ne cesse de s’alourdir, tant au pénal qu’au civil ». De quoi inquiéter les membres du comité de concertation.

Ici, c’est la multiplication des techniques d’instruction (repérages, écoutes téléphoniques, recherches génétiques…). Là, la fin des audiences à trois juges. Plus loin, l’arsenal des peines qui a explosé, le recours grandissant aux expertises ou l’inflation législative.

« On doit toujours faire plus, avec moins », résume Philippe Glaude.

Le cadre prévoit septante-neuf magistrats, ils sont en réalité septante-et-un : « Moins deux malades de longue durée, trois candidats pour une mutation et sept départs à la pension programmés en 2019-2020 », précise le président.

Du côté des greffiers et des employés administratifs, mêmes carences.

« Un personnel remplacé de manière aléatoire, obscure, épisodique ou temporaire et à l’issue de très longues procédures, ce qui complique considérablement la gestion et crée de nombreuses frustrations », lit-on dans le dernier rapport d’activité du TPI.

La machine judiciaire liégeoise tourne néanmoins à plein régime : plus de 3 000 jugements rendus au civil en 2017, 3 300 affaires pénales, 6 000 décisions du tribunal de la famille, 
2 030 dossiers protectionnels en jeunesse,
4 300 en chambre du conseil, sans compter les milliers d’ordonnances rendues et les PV de conciliations, auxquels il faut encore ajouter les chiffres d’activités de Huy et Verviers. 

Un contentieux qui a néanmoins tendance à baisser (à quelques exceptions près : les affaires familiales et fiscales, notamment) pour des raisons multiples : un coût d’accès à la justice qui reste élevé, le recours à une justice plus conciliatrice (règlement à l’amiable, médiation…), une défiance vis-à-vis de l’institution, etc. Avec une justice qui semble relativement tenir son rôle : « Seulement un faible pourcentage des décisions que l’on prend font l’objet d’une procédure d’appel, souligne Françoise Diverse, présidente de la division de Liège. Cela démontre que celles-ci ont permis d’apaiser les parties, de servir de base  à une nouvelle négociation. »  

Il n’empêche, au quotidien, les magistrats n’ont pas le temps de chômer : « Les jeunes collègues en particulier sont souvent très exigeants. Ils soignent leurs jugements qui sont plus longs, plus motivés. Les avocats plaident plus. La jurisprudence s’étoffe. Et la charge de travail s’alourdit », ajoute Philippe Glaude.

Avec des délais de fixation des affaires qui fluctuent selon les matières (de quelques mois à plus d’un an), un arriéré judiciaire limité (des jugements rendus en grande majorité dans le mois), mais des  retards qui s’accumulent aussi à cause du manque de personnel.

« Si on est obsédé par les chiffres, on ne fait pas du bon boulot, grogne un magistrat proche de la pension. Une justice d’abattage et productiviste, trop peu pour moi ! »   

Mercredi, l’inquisitrice et l’oisiveté  

« Il n’a pas compris la question… » Debout et fébrile, l’ex-balayeur de rue, hispanophone et de bonne foi, peine à se faire comprendre. « Monsieur est espagnol, et comme pour son audition, il a demandé un interprète et il n’y en a pas ! », reprend l’avocat. La juge Debrule n’en a cure : elle fonce, sèche et impatiente pour traiter ce dossier pénal. Cet ex-agent de la Ville licencié est poursuivi pour vol simple et abus de confiance – une vague histoire de vol de GSM en rue, vingt-deux rouleaux de sacs-
poubelle et huit bouteilles de produits d’entretien dérobés.  « La Ville vous avait dit : servez-vous ? », ironise la magistrate sur un ton moralisateur.

La proc’ demande une peine de travail de 80 heures et 26 euros d’amende. « Pas de regrets, Monsieur ? » Le prévenu n’a toujours rien compris, ne dit mot et s’en retourne des larmes plein les yeux…

Autre affaire, même ton péremptoire : deux jeunes de 20 ans comparaissent pour avoir tagué un combi de police. « Je suis seul à avoir dessiné sur le véhicule, reconnaît le premier. J’étais en état d’ébriété, je n’ai pas l’habitude de boire ». « Très mauvaise idée ! », rétorque la juge, avant de sermonner les deux graffeurs. Quand le prévenu évoque son parcours d’ex-ouvrier intérimaire sans emploi et ses désirs d’« école de cirque », la magistrate s’esclaffe : « l’oisiveté, on voit où ça mène ! ». A l’étage d’en haut, devant la 16e chambre, les dossiers s’enchaînent, mais l’esprit est tout autre : à 24 ans, plusieurs condamnations pour roulage à son actif, un bellâtre comparaît pour avoir provoqué la police place Cathédrale, à bord d’une Mercedes, 570 chevaux sous le capot, « louée pour un mariage », en enchaînant coups de gaz, crissements de pneus et fanfaronnades : « Ils m’ont nargué, je ne me suis pas laissé faire », regrette l’intéressé devant la juge Arbib qui patiemment écoute, questionne et veut comprendre.

Photo : Jean-Louis Wertz

Il en sera de même avec ce voleur à la tire, multirécidiviste, bénéficiaire du CPAS, qui arrive menotté. Alcool, haschich, il a plongé. « C’est pas ma vie, Madame, je suis un mauvais voleur. Je ne veux plus faire ça », se confond l’homme, la tête basse. Le dernier méfait de ce «  Robin des bois de Saint-Léonard », comme le décrit son avocat ? Des vêtements d’enfants volés chez Hema pour offrir dans son quartier !

La juge esquisse un sourire et promet son jugement fin octobre, avant d’accueillir, avec le même tact, un couple de toxicomanes bien connus sur la place, interpellés pour avoir fracassé une voiture et volé son autoradio.

A leurs côtés, magnanime, la victime désire « juste que tous [ses] frais soient remboursés ». Un ange passe de part et d’autre de la barre : ni haine ni assaut, juste un peu de finesse et de sérénité.

Jeudi, avec ou sans boussole

« Faites-nous plaisir, montez dans l’ambulance. » Toute tremblotante, la vieille dame s’exécute, victime d’un malaise lors d’une audience.

Toge au bras, discrets ou démonstratifs, les avocats entrent et sortent, discutent en aparté avec leurs clients, pianotent sur leur smarphone. Cabotin, discret ou concentré, à chacun son style.

« Va te faire foutre ! », s’exclame une jeune femme en courant.

La colère, le soulagement, l’inquiétude, l’attente… Derrière chaque justiciable, il y a un visage marqué, une convocation à portée de main, la porte d’une salle d’audience à franchir.

Inauguré en 2015, le nouveau palais est fonctionnel, lumineux, mais très peu chaleureux : trois ailes distinctes, des niveaux qui se chevauchent, des volées d’escaliers, plusieurs ascenseurs et une circulation compliquée. « A moins d’avoir un sacré sens de l’orientation », ironise un greffier. L’aération laisse à désirer. « Il fait torride en été et froid en hiver », se plaignent les magistrats. L’acoustique est loin d’être optimale. Quant à la signalétique, elle est carrément en dessous de tout. 

« Dans l’ancien palais, il y avait une âme, un certain décorum, la cour à distance. Ici, c’est le visage d’une justice plus proche, moins sacralisée, mais peut être aussi moins chaleureuse », constate la juge Collard.

Un des avantages de ce nouveau bâtiment ? Les magistrats ont désormais un bureau. «Avant, on venait juste pour les audiences, on préparait et rédigeait ses jugements chez soi. La solitude du juge, ce n’était pas une expression en lair. Là, on peut davantage travailler en équipe », se réjouit Françoise Diverse.

Encore faut-il que les magistrats bénéficient de moyens adaptés : il n’y a plus de codes en papier, l’accès aux revues spécialisées (Strada, Jura…) est remis en question, les juristes-documentalistes (les référendaires) sont au nombre de cinq pour tout le TPI et ne sont plus remplacés…

« Quand s’arrêteront ces coupes budgétaires ? » s’interroge un greffier d’audience.

Certes, le palais est équipé du wifi depuis quelques mois. Des imprimantes ont été installées dans certaines salles. Le scannage des dossiers a débuté au civil. Mais l’informatisation est lente et parcellaire : un simple intranet, des échanges par mail, des archives papier qui s’accumulent. « On n’est pas encore entré dans la modernité ! », ironise un agent du SPF. Pendant ce temps, l’activité judiciaire se poursuit.

A la 18e chambre (Ecofin), Monsieur K., n’en mène pas large : ce gérant de société est poursuivi pour avoir maquillé le livre des parts lors de la faillite de son restaurant créé avec un ami cuisinier.  

Une salle plus loin, en appel de police, c’est une collision en chaîne qui mobilise le tribunal : trois véhicules sont impliqués « chaussée de l’amour » à Tongres. Le premier conducteur prétend avoir freiné pour éviter un chat…

Plus loin, à la 15e chambre, on ne ronronne guère : cinq accusés, dont un détenu, répondent d’un vaste trafic de cocaïne. Leur avocat multiplie les effets de manche. Le juge n’est pas dupe : dans ses yeux, on devine déjà une lourde condamnation. 

Vendredi, la valse des saisies

« Je viens récupérer mon Iphone », explique la jeune fille.  « Montrez-moi votre document », répond le préposé, avant d’aller vérifier dans l’armoire en fer. Lorsqu’une policière d’Herstal se présente à son tour au comptoir pour déposer une arme longue rangée dans son fourreau. Nous voilà dans l’aile D, au 1er étage, au service des pièces à conviction, là où transitent une partie des objets placés sous scellés, conservés sous l’autorité judiciaire et nécessaires à la recherche de la vérité dans une affaire pénale. 

Armes en tous genres, GSM, vêtements de victimes, enregistrements de caméras de surveillance, cartes SIM, prélèvements sanguins… « Il y a un peu de tout, raconte l’agent en fonction. Ces objets sont consignés et stockés au dépôt de Jupille, sauf les armes et les voitures ».

Sur décision d’un magistrat, ces pièces seront restituées, confisquées, ou détruites. « Il existe plusieurs procédures : les stupéfiants sont brûlés en incinérateur, les armes sont détruites via le Banc d’épreuves, l’argent placé sur un compte ING… ». Sur la table, un revolver attend sous plastique. Posé sur le coffre blindé, c’est un fusil de chasse. La valse des scellés. Loin des yeux, au cœur des affaires.    

Troisième semaine

Lundi, décorum et vieux parquets

Il ne reste plus grand-chose de « ce grave édifice » décrit par Victor Hugo en 1840 dans Le Rhin, où l’on devine derrière chaque fenêtre « des plaidoiries irritées » et où « dans cette sombre cour, recueillie et silencieuse autrefois comme un cloître dont elle a la forme, se croise et se mêle perpétuellement aujourd’hui la double et intarissable parole de l’avocat et de la commère, le bavardage et le babil. »

Aujourd’hui, le « vieux palais » des Princes-Evêques s’est tu ou presque. Il demeure bien quelques pigeons qui s’ébattent entre les soixante arcades majestueuses, des avocats pressés qui s’en vont tenir leur permanence au Bureau d’aide aux justiciables, des PJistes en civil, un écrivain public, les bureaux du bâtonnier, le parquet et l’auditorat général et puis, surtout, la cour d’appel, mais la ferveur judiciaire n’y est plus.

Dans les interminables couloirs de ce palais néo-gothique règne une étrange atmosphère : un mélange de silence feutré, de parquets cirés qui craquent, de murs décrépis et de décorum d’un autre siècle.

Un lieu chargé d’histoire, d’intrigues et de mystères, sur lequel plane l’ombre de nombreuses grandes affaires criminelles, politiques et financières : l’assassinat de Julien Lahaut (1950), les attentats des CCC (1985), l’affaire Cools (1991), le meurtre de Marc et Corinne (1992), l’affaire Dutroux (1995), la tuerie de Liège (2011), le meurtre homophobe d’Hassan Jarfi (2013)…

Alors, ce « Hey Macarena ! » qui s’élève du Tivoli voisin où se déroule un tournoi sportif contraste curieusement avec la solennité des débats, les arguties de la Cour, le portrait défraîchi d’Albert et Paola, les bustes triomphants et le calendrier d’audiences des appels du jour : abus de biens sociaux, faux et usage de faux, escroquerie… 

Thémis dans toute sa splendeur : fastueuse et déclinante, décalée et fascinante.

Mardi, le couloir de la discorde

« Quand papa et maman sortiront avec leur avocat, tu pourras rentrer », explique Louis, le huissier, à l’adolescente pétrifiée qui attend sur le banc. Le juge va entendre la fillette dans le cadre de la procédure.

Divorces, séparations de couples non mariés, gardes d’enfants, hébergements égalitaires, attributions de pensions alimentaires… Le tribunal de la famille est archi-débordé. Et ce mardi, dans le couloir, la tension est vive, comme souvent. 

« Tu as entendu ce que la juge elle a dit ? », hurle une maman.

« Tu auras des nouvelles par mon avocat ! » prévient plus loin un ex-conjoint en claquant la porte.

Il y a des yeux rougis, du stress dans l’air, des couples qui attendent indifférents, émus ou à couteaux tirés. Il y a des avocats qui rappellent quelques trucs et ficelles à leurs clients avant d’entrer dans la salle.

Il y a des négociations à l’amiable sur un coin de table : « Je veux bien la reprendre le lundi soir, tu irais à la danse le mardi avec elle ? ».

Il y a Louis qui distribue des attestations de présence pour l’école ou l’employeur. Et derrière les portes, à huis clos, il y a les juges qui doivent écouter, arbitrer, décider… 

Une petite fille enlace son papa qui pleure. Et en arrière-plan, on aperçoit le panneau vantant les bienfaits de la médiation « la participation active de tous à la solution ».

A l’étage, l’atmosphère n’est guère plus tranquille : les juges de la jeunesse enchaînent les dossiers protectionnels. Délinquants mineurs, enfants en danger, placements, conciliations parentales… Ils sont sur tous les fronts. Pour recevoir les jeunes, leurs parents, leurs conseils, les services sociaux (SAJ, SPJ…).

Dans la salle d’attente, une mère catastrophée a déboulé au Palais : « mon fils a déconné et passé la nuit au cachot ». La police a amené un délinquant récidiviste. Un grand gaillard a vu « son juge » avant de retourner à l’école et semble soulagé. Et dans la cellule froide où sont enfermés les plus récalcitrants, on peut lire gravé sur les murs de béton : « Baise la PJ », « Bledard », « Susseur de bit » (sic)…

Des mineurs auteurs ou victimes de violences. Des parents dépassés ou démissionnaires. Des centres d’accueil saturés. Des jeunes déscolarisés, sans perspectives, qui accumulent les échecs et les délits. Des maltraitances graves. Des existences brisées. La routine du tribunal de la jeunesse où, la semaine précédente, les Frères Dardenne et leur équipe sont venus tourner quelques scènes de leur prochain film. Quand la réalité rejoint la fiction, au 2e étage du TPI.                

Mercredi, chez Madame la greffière

« Merci Madame… » Muriel Godin raccroche son téléphone : « Cette dame me prévient qu’elle ne pourra pas être… ascenseur », sourit la greffière en chef. Dans un mois, ce sont les élections communales et son service est sur les charbons ardents : 7 500 assesseurs à convoquer, des dizaines de listes à vérifier et enregistrer, 181 bureaux de vote à superviser… « Avec une grande inconnue cette année : le retour au vote papier. Et puis fin mai, on remet ça, avec la super élection : régionale, fédérale et européenne. »

Une charge en plus « de tout le reste » pour ce service en sous-effectif lui aussi (161 greffiers contre initialement 180 prévus) et dont les missions sont pourtant essentielles : accueillir le public, tenir la comptabilité du greffe, passer différents actes, fixer et préparer les audiences, assister le juge, rédiger les procès verbaux, notifier les jugements…

« Le greffier a des compétences étendues, il est indépendant et impartial, c’est lui le garant de la procédure », rappelle Muriel Godin.

Photo JeanLouis Wertz

Néanmoins, au TIP de Liège comme ailleurs, les greffes sont plus que jamais sous pression avec un allongement des délais de procédure, des outils informatiques limités, l’explosion des dossiers « famille », des audiences à la chaîne, l’accueil de justiciables de plus en plus démunis… « Il y a énormément de mouvements, de stress, d’inconnues et parfois d’inertie. On veille à répartir au mieux les tâches de travail, à positiver au maximum, à trouver des trucs et ficelles pour assurer le bien-être du personnel et offrir un service de qualité. Car derrière chaque procédure, il y a de l’humain avant tout. »

Jeudi, sur les bords de Meuse

Construit en 1994, le palais de justice de Huy est un paquebot de taille moyenne entièrement vitré, le nez plongeant dans la Meuse voisine, « loin des radars de la capitale », comme le dit avec humour son président, Jean-François Marot, au centre d’un canton judiciaire entièrement réorganisé qui compte environ 140 000 habitants et rattaché depuis la réforme du paysage judiciaire au TPI de Liège. « Nous n’étions pas demandeurs et c’est parfois lourd en terme d’organisation, mais nous gérons tout cela en bonne intelligence avec mes collègues de Liège et Verviers. Comme dans toute réforme, il y a du bon et du moins bon. »

Avec ses neuf magistrats, ses dix greffiers, ses vingt membres du personnel, son mess où se côtoient également les avocats, ses audiences civiles et de droit commun qui se succèdent à un rythme soutenu mais pas infernal, le tribunal de Huy affiche un petit air paisible et provincial.

Mais, ici comme ailleurs, il s’agit de composer avec le contentieux intra-familial qui monte, les justices de paix qui ne désemplissent pas, le prix de la justice qui augmente avec la récente augmentation des droits de greffe (50 euros pour le dépôt, 165 euros pour une procédure de divorce, 400 euros pour aller en appel)… « Nous sommes par ailleurs confrontés à une véritable inflation législative, poursuit le président, des réparations de lois successives, des moyens budgétaires qui diminuent, un service public qui emprunte les méthodes du privé : les justiciables sont des ‘‘clients’’, les jugements des ‘‘produits’’. On nous parle ‘‘d’unités’’, d’évaluation de la charge de travail… Au-delà des mots, il y a toute une philosophie managériale qui s’installe progressivement. »

Pendant ce temps,au rez-de-chaussée, devant la 16e chambre, les affaires se succèdent : rébellion, trafic de cannabis, coups et blessures… Un revendeur de pacotille, un jeune qui a reçu une bouteille au visage, un caïd à la main lourde… Le juge Maglioni les reçoit et les entend avec diligence. Une justice claire et posée. Avant que n’éclate dans le couloir ce « Je m’en bats les couilles ! » lancé par un prévenu excédé.     

Vendredi, tristes affaires de mœurs

Fanta arrive menottée, les yeux tombants, perdue dans son sweat rose Quincy. Elle est en prison depuis plus d’un mois et comparaît pour des faits graves commis à l’encontre du petit Ousmane, le fils de son compagnon, victime de maltraitances. Le petit arrivait en classe souillé, avec des traces d’hématomes, des coups de ceinture et des brûlures. L’école a porté plainte. « C’est son papa qui l’a frappé. C’est lui qui décide tout… », se défend « Tatie » en sanglotant.

La procureure n’en croit rien et attaque l’accusée, 31 ans, mère de deux enfants par ailleurs, et réclame une peine de deux ans, avec un sursis probatoire. Son avocate lui jette un regard affectueux avant qu’elle ne reparte par la porte dérobée, honteuse, entourée de deux policiers. 

L’audience de la chambre des mœurs se poursuit entre rapports sexuels forcés, traitements dégradants, incestes… Trois juges face à l’effroyable misère sexuelle, l’immoralité et le défilé des cas pathologiques.

A l’image de ce jeune père de famille accusé d’attentat à la pudeur, d’attouchements, mais aussi de viol sur sa fille aujourd’hui âgée de plus de 16 ans. Il voulait « combler un manque », la trouvait « très provocante » et se sentait « amoureux d’elle ». Il nie le viol (« elle a accusé tous ses beaux-pères ») qui remonte à l’âge de ses 4 ans,mais reconnaît « qu’il n’a pas pris ses responsabilités de père ».

Déscolarisée et en fugue, la jeune fille est absente à l’audience et n’a pas souhaité se faire représenter. Mais sa mère est là, bouleversée. Comme d’autres parents, dans d’autres affaires tout aussi intimes et sordides, elle est livide face au tribunal calme et stoïque. Admirable et éternelle justice des hommes, indispensable pilier de notre Etat de droit. — Hugues Dorzée

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